Un aîné m’expliqua en ces termes, la raison pour laquelle il y a peu de femmes en politique : il est difficile de trouver des femmes qualifiées. Avant que vous ne lui sautiez à la gorge, sachez, qu’à sa manière, c’est un grand féministe. Il pense qu’il y a un véritable effort à faire pour que les femmes restent plus longtemps à l’école et s’y emploie lui-même. Et il n’a pas tout-à-fait tort. Si, selon l’UNICEF, citée par Evelyne Trouillot Ménard dans son texte sur l’éducation en Haïti, 70% des jeunes femmes âgées de 15 à 24 ans savent lire, celles-ci quittent l’école plus tôt que les garçons. Sacrifiées au profit de leurs frères – quand les frais scolaires deviennent trop lourds pour la famille – et à moins de trouver un big boss généreux, elles n’ont plus qu’à abandonner leur rêve d’études universitaires et s’employer à autre chose comme se marier ou trouver un job.
Moi, je vois les choses un tantinet différemment. À voir défiler nos honorables, de législatures en législatures, il me semble que les qualifications qui manquent aux femmes ne sont guère liées au nombre d’années passées sur les bancs de l’école. Même quand leurs femmes les gadent et les coutent, la plupart de nos parlementaires ne brillent pas exactement par leur intellect.
Le problème est ailleurs. Dans notre démocratie en mal de demos, ne réussit pas aux élections qui veut. Aussi ai-je établi un petit manuel – mon second du genre – pour gagner les élections, même si la nature nous a fait l’affront d’un vagin:
- Avoir un excellent trésor de guerre. L’argent, disent-ils, est le nerf de la guerre. Et les élections chez nous, c’est la guerre. Souvent, littéralement. Ce qui nous amène au point deux.
- Avoir sa petite armée. Non, ce n’est pas un dysphémisme. Armez-vous. Vos adversaires tenteront de vous faire peur avec leurs gros joujoux – ainsi que me l’a confié, un peu avant le début officiel de la campagne électorale, une candidate malheureuse à la députation. Vos adversaires, surtout s’ils sont du parti au pouvoir vont tirer sur une de vos voitures le jour des élections et débarquer avec des agents des forces de l’ordre à la fermeture des bureaux pour tenter de faire disparaître les procès-verbaux. Vos adversaires vont kidnapper les présidents de bureaux électoraux communaux pour les forcer à changer des PVs. Il faudra donc être prêt pour la bataille. Ce qui nous amène à notre troisième point.
- Acheter les membres et employés du CEP. Même si le demos est avec vous, vous n’êtes pas à l’abri d’irrégularités massives qui, comme par hasard, auront lieu à votre encontre. Pour limiter les irrégularités au maximum, s’assurer de la loyauté des membres de l’appareil électoral est capital. Les privilèges incluent une protection rapprochée de vos PVs avec livraison VIP, si vous savez vous faire respecter. Ce qui nous amène à notre quatrième et dernier point.
- Avoir des couilles*. Désolée, les filles, mais, les élections, ce n’est pas un jeu. Fusse-t-il démocratique.
De rien.
* Pas toujours littéralement. Deux femmes pourraient rejoindre la 50e après le « troisième tour ». Elles ont en commun le fait, stéréotypé certes mais le monde est ainsi fait, d’aimer le rose.