De l’urgence de la lutte contre la pêche illégale et de l’importance cruciale du soutien canadien à la crise haïtienne

Je commence par un aveu. Nous méritons peut-être qu’on se foute de notre gueule. Après tout, quoi de plus normal, pour un pays riche, que de se moquer d’un pays dont les habitants rêvent à 80% de le laisser au plus tôt, attendent à 70% qu’une intervention étrangère vienne y mettre de l’ordre et se battent comme autant de diables dans un bénitier pour obtenir le passeport qui les aidera à s’enfuir quam cito de la terre de leurs ancêtres dont ils sont fiers.

Dans la diaspora haitienne, celleux qui ont pu s’échapper plus tôt, se retrouvent, courtoisie de l’administration américaine, sous une pression énorme pour sponsoriser amis et membres de leurs familles sous peine d’être percu.e.s comme des sans cœur. Laisser des Haïtiens en Haïti serait désormais l’équivalent d’une condamnation à mort. Personne ne semble songer à sauver ce qui reste. Haïti n’est plus. Ne reste plus qu’à partir. Sauf, il appert, les forces étrangères qui doivent, elles, venir nous débarrasser de leaders communautaires, gardiens de barricades et autres exécuteurs de lòk transformés en puissants chefs de gang aux territoires de plus en plus vastes.

Un tel niveau de pathétique en devient grotesque. Frôle la bouffonnerie. Force à se retenir de rire. Lors de grandes rencontres internationales l’on évoque, avec le plus grand sérieux, la situation gravement grave d’Haïti pour ensuite décider de ne rien faire. Parce que, Haïti, LOL.

En Haïti, nous continuons d’attendre ; notre dépendance au Blan étant en passe d’entrer dans la légende. Vous me direz qu’il l’a cultivé. Certes. Je vous objecterai que nous n’y avons pas opposé de grande résistance. C’est certain.

Pour passer le temps, les États-Unis d’Amérique ont demandé au Canada de jouer le jeu du Messie réticent. Le Canada s’y prête volontiers, avec une touche canadienne, juste pour rire.

Hier, l’Ambassadeur du Canada en Haïti nous informait, sur Twitter, qu’un avion de l’armée canadienne survolait le territoire haïtien, avec l’accord du gouvernement haïtien qui, naturellement, s’enferme dans un mutisme criant.

Ce matin, la ministre de la défense nationale et la ministre des affaires étrangères du Canada se sont fendues d’un communiqué conjoint sur cette opération de renseignements top secrète opérée par un avion d’une impressionnante autonomie pouvant aider, entre autres, à « lutter contre la pêche illégale, la pollution, le trafic de drogue, etc. » Je ne sais pas pour vous mais, tous les soirs avant de me coucher et chaque matin au lever, je ne peux m’empêcher de penser à l’urgence de lutter contre la pêche illégale en Haïti. Il est à espérer, toutefois, que cette prise d’intérêt ne finira pas en queue de poisson.

Certain.e.s maintiendront qu’il y a anguille sous roche; que le Canada, et la communauté internationale avec lui, cherchent à noyer le poisson. Après tout, nous sommes encore à attendre que les sanctions canadiennes contre nos criminels d’élite s’étendent aux autres États membres comme le demande la résolution 2653 (2022) du Conseil de sécurité de l’ONU. Sanctionner Jimmy Cherizier, alias Barbecue, c’est bien, mais les mesures proposées s’appliquent difficilement à lui, de l’embargo sur les armes (il les achète au marché noir) au gel de ses avoirs (il les garde avec lui) à l’interdiction de voyager (il reste chez lui). Il semble d’ailleurs être l’un des rares Haïtiens à ne pas être pressés de partir. Sa dernière entrevue à Sky News ne donne guère l’impression qu’il pense à s’enfuir.

Quant aux sanctionnés de la liste canadienne, hormis une petite gêne associée à leur nouveau statut de parias, ils s’en sortent plutôt bien. Étant généralement nés avant la honte, ils attendent que la vague passe, pour reparaître comme si de rien n’était. À de rares exceptions près, leurs avoirs au Canada sont inexistants. Les États-Unis d’Amérique – hormis quelques politiciens qu’ils ne tenaient déjà pas en grande estime – ne sont pas plus pressés de mettre en application la résolution du Conseil. Le Royaume-Uni et la Suisse ont adopté les législations nécessaires mais le suivi se fait attendre. Peut-être travaillent -ils, dans le plus grand secret, à finaliser la liste avec Monsieur Michel Xavier Biang, le président (gabonais) du Comité créé par la résolution 2653. Après tout, son mandat s’étend jusqu’au 31 décembre 2023, il faut savoir être patient.

N’empêche, à lire ce matin la longue liste des actions d’une rare importance entreprises jusqu’ici par le Canada pour notre bien-être, il est difficile de ne pas sentir comme un petit air de foutage de gueule dans cette énumération reprise dans un communiqué qui, au final, n’avait rien à dire: le déploiement du CP-140 Aurora est une autre façon d’aider le peuple haïtien comme:

  • la mission de décembre pour dire aux Haïtiens de se parler
  • les sanctions de novembre pour dire aux Haïtiens que leurs élites économiques et politiques sont corrompues
  • les délégations d’octobre pour consulter les Haïtiens et leur livrer une partie des blindés qu’ils ont achetés
  • l’annonce de septembre d’une contribution de 20 millions de dollars pour la reconstruction post-séisme

Depuis septembre 2022 donc, il n’est aucun mois où le Canada n’a pas aidé le peuple haïtien. J’ai hâte de voir ce à quoi nous aurons droit en mars.

9 commentaires sur “De l’urgence de la lutte contre la pêche illégale et de l’importance cruciale du soutien canadien à la crise haïtienne

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