René Préval aimait à rappeler qu’on était venu le chercher pour être candidat. Il s’était retiré dans sa Marmelade pour vivre sa vie tranquillement et voilà que, après la transition Boniface-Latortue, on était venu l’arracher à sa retraite. Je n’ai jamais pensé à lui demander de préciser le « on ». Je me doutais qu’il ne le ferait pas. Je n’ai jamais pu m’empêcher toutefois de me rappeler ce vieil ami, employé du Département d’Etat américain qui, en 2006, alors que les candidatures à la présidence se multipliaient et que je m’en désolais, assura à l’adolescente que j’étais que Préval serait le prochain Président d’Haïti. Connaissait-il « on »?
C’était un colonel noir à la retraite qui aimait Haïti et était tombé amoureux de Plaisance du Sud et de la fondation que nous venions de mettre sur pied, un oncle et moi. Comme J., il me voyait déjà dans un poste politique important. Il insista pour me présenter aux responsables de la bourse Fulbright mais, comme je leur expliquai, mes projets d’étude n’incluaient pas alors les États-Unis d’Amérique. Nous nous étions rencontrés à une conférence où il intervenait en tant qu’expert. J’avais posé une de ces questions qui dérangent et cela l’avait fait sourire. Il y répondit comme il pouvait mais, à la fin de la conférence, alors que je m’apprêtais à partir, il me rattrapa et me demanda si nous pouvions discuter un peu. La discussion dura près d’une décennie.
Au cours du premier mois de nos échanges, j’appris que René Préval allait bientôt prendre connaissance qu’il était candidat. Quelque temps après, les magnifiques posters d’un Préval souriant et sa luxuriante barbe argentée étaient partout.

Préval devint Président, par la grâce d’un bain de piscine particulièrement inspiré et des votes blancs doctement redistribués par une communauté internationale magnifiquement inventive. Sa Présidence fut ce qu’il fut. Depuis, toutefois, je garde un intérêt certain pour le moment où une candidature à la présidence se décide. En 2015, j’avais même monté un projet pour les 56 candidat.e.s à la Présidence mais il a dû être avorté. Le désir de le faire, toutefois, ne s’est jamais amoindri et depuis que, hier, j’ai appris que le Président Moïse a, lui aussi, pris connaissance qu’il était candidat, j’ai décidé de relancer l’étude.
Ceci est donc un appel formel à tou.te.s les futur.e.s candidat.e.s à la Présidence. Laissez-moi vous interviewer. Merci.