Ce matin, ma mère m’envoie ce tik tok d’un André Michel décrivant la vie idyllique qui serait la nôtre le lendemain du départ de Jovenel Moïse du pouvoir. L’avocat autoproclamé du peuple est coutumier de ces déclarations à l’emporte-pièce mais celle-ci accuse une turpitude particulière au vu de la dégradation du pays après le magnicide de 2021.
Ma mère accompagne le tik tok d’une remarque inattendue. Jovenel Moïse, me dit-elle pince-sans-rire, est le nouveau Toussaint Louverture. Et, comme je demandais une explication, elle s’est mise à rire comme si elle avait trouvé la blague du siècle. J’insistai. Entre deux fous rires, elle m’explique que la raison pour laquelle rien n’a changé c’est « parce que le défunt président n’est jamais parti ». « En [le] renversant », on n’aura abattu que le tronc de JoMo et le voilà qui « repousse par ses racines parce qu’elles sont profondes et nombreuses ».
Ma mère a toujours vu Jovenel Moïse avec humour, voire même, peut-être, un peu d’empathie. Ce fauxpreneur de la banane qui était réputé avoir des centaines de millions de dollars de contrats étrangers mais qui se comportait comme le laquais de Michel Martelly lui avait paru curieux. Le pauvre malheureux, disait-elle. Puis elle me parlait de paysans revanchards, de rancunes tenaces et du fait que tout cela finirait mal. Et puis, sur ce blogue, nous savons que la banane a deux fins.
Mais revenons à notre président-zombie car, même si ma mère fait de l’esprit, elle n’a pas tort. Même mort, Jovenel Moïse préside encore à nos destinées. Officiellement, nous n’avons pas de président et le chef actuel de l’État est son premier ministre post-mortem, installé littéralement après la publication du cadavre de celui qui l’avait nommé. Le gouvernement d’Ariel Henry est techniquement partie de l’administration Moïse. Il semblerait donc aller de soi qu’elle en maintienne les caractéristiques premières : mensonges éhontés, corruption, impunité, incompétence et autres éléments kakistocratiques.
L’impuissance face aux gangs également :