Je le vois encore clairement. Son sourire gêné suivi d’un éclat de rire forcé.
Je me suis senti violé, Patricia. Hahaha. Nous étions à la réunion et sa main a glissé sur ma cuisse. Au début, j’ai pensé qu’il s’agissait d’une erreur, que sa main était tombée là, par hasard, mais elle a commencé à presser et à chercher mon entrejambe. Haha. La fille m’a pratiquement violé. Hahaha. Je me suis senti comme un morceau de viande. Haha. Je dois faire attention avec elle.
Il en riait. Pas parce qu’il trouvait cela drôle mais parce qu’il est un homme et qu’un homme ne se formalise pas de ces choses. Il ne voulait pas jouer à la vierge effarouchée, n’est-ce pas ? Et puis il ne voulait pas la blesser. Il avait bien fini par trouver un prétexte pour se déplacer mais, tout de même, Patricia, ces filles sont si agressives de nos jours. Lol.
Pas lol, fis-je, presque par réflexe. C’est un discours que j’avais trop souvent entendu pour le laisser passer. Le discours de jeunes femmes qui, souvent par peur des jugements de la foule et de représailles, s’évertuent à s’extraire d’une agression sexuelle, sans faire de vagues. Tes sentiments sont valides. Tu avais le droit d’être dégouté, révulsé et même de te fâcher. Tu avais le droit de le lui dire – ne pas la blesser n’est pas la priorité ici quand elle est l’agresseure. Tu n’avais pas à subir une agression en public jusqu’à ce que tu trouves un moyen ingénieux de t’en extirper.
Il en convint aisément mais bon, ce n’était pas si grave. Il éviterait la fille, un point c’est tout.
Le texte de Mitsouca Célestin m’a remis cette histoire à l’esprit. Ce verre à Paris et cette main qui s’active. Cette impression de bave gluante qui colle à la peau. La nausée qui doit accompagner la sensation de cette main poisseuse qui s’invite sur nos cuisses. Et puis cette conversation atroce et tout ce qu’il y a pu y avoir d’horrible et d’épouvantable dans cette rencontre.
Peut-être qu’au final, il vaut mieux l’expliquer clairement à ces messieurs et dames : vos mains sur des cuisses non consentantes ne sont pas une technique de drague. Il s’agit d’une agression sexuelle pour laquelle tant le code pénal en cours que le nouveau prévoit des sanctions. Il s’agit d’une violation en règle du droit humain le plus fondamental, celui de chacun à disposer librement de son corps. Il s’agit d’un crime contre la dignité.
Patricia, il a suffi que je vois le titre pour me dire : Tout le monde devrait savoir ça, en particulier, tous les hommes se comportant comme des prédateurs et qui feignent parfois de ne pas le comprendre de cette manière. En tous cas, le texte est magnifique. Dire qu’il est bien écrit revient à dire qu’il a été écrit par Patricia Camilien. Keep it dear friend!
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Merci Hervé.
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