Mes plus grands échecs

Mes plus grands échecs ont la fâcheuse manie de ne m’inclure que de façon circonstancielle. Comme pour tourner le couteau dans la plaie. Regarde, me disent-ils, tu n’es même pas fichue d’avoir un échec qui soit vraiment tien. Loser !

Je n’essaie pas de me défendre. Mes plus grands échecs ont raison. Mon cas est effectivement pitoyable. Une ancienne étudiante qui cite Machiavel pour justifier la destruction de ses concurrents, avec le soutien du PHTK, et m’assure que c’est grâce à moi. Une mobilisation citoyenne que j’ai aidé à émerger pour voir en sortir des désaxés fascistes en guerre contre un sondage (et la réalité). Un ancien étudiant qui, après son premier tour au Parlement, décide au second de s’approprier du maximum possible, parce que, au final, mes histoires d’éthique, c’est pour les nuls.

Je passais devant la toute nouvelle maison de ce dernier dans un quartier huppé lorsqu’on m’informa de ses richesses fraîchement formées. Monsieur serait désormais entrepreneur avec entreprises pour lui et sa dulcinée. Monsieur serait propriétaire d’une charmante bâtisse aux couleurs rappelant la Toscane. Monsieur aurait décidé d’utiliser tout ce qui lui passerait dans les mains au cours de son second (et dernier, il l’avait décidé) mandat pour changer sa vie.

Il avait essayé, au début du premier. Être un bon parlementaire, à défaut d’être honnête. Il venait d’arriver. Il voulait changer les choses. Pour sa communauté. Pour lui aussi, certes, mais bon… pour la communauté aussi. Cela ne dura pas longtemps. Il vit les autres aller. Leurs petites brasses par-ci et leurs magouilles par-là. Il commençait à se sentir idiot, bête, stupide et maints autres synonymes pour egare. Il résolut de devenir intelligent.

Il devait commencer en retard et ne pourrait donc engranger autant qu’il aurait voulu. Aussi, résolut-il d’y aller progressivement, de briguer un second mandat et de, une fois, sa place assurée, mettre en route son plan d’engranger encore et encore, jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien à grappiller, pour à la fin de son mandat, se reposer, enfin, le ventre repu.

Son plan réussit. Mieux que le premier. Servir sa communauté au Parlement, c’est compliqué. N’y pas surfacturer est sacrilège. Avoir un autre dieu que la corruption est à la limite du blasphème. Au deuxième mandat, les dieux lui furent favorables. Il s’en sortit bien, le voilà confortablement installé dans une classe moyenne aisée dont l’accès – ascenseur social bloqué exige – passe souvent par la drogue (qu’il faudrait légaliser) ou la politique (qu’il faudrait moraliser).

Des fois, il me prend des envies de lui demander comment il peut vivre avec cette abyssale trahison de ses mandants, mais j’ai trop peur de sa réponse pour oser le faire en vrai. Heureusement, il lit ce blogue.

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