Les personnes non-hétérosexuelles ne le sont pas que dans leur chambre

Les fous de Dieu sont dans les rues. Ils protestent contre un code pénal – inventé de toutes pièces – contre lequel ils ont signé une pétition – subrepticement modifiée depuis – et contre lequel ils protestent pacifiquement pour dire oui à une « moralité » qui doit mentir pour mobiliser.

Manifestation contre l’immoralité – 26 juillet 2020

Des citoyen.ne.s soulignent l’étrangeté d’une mobilisation qui se préoccupe de ce que font les gens dans leur chambre alors que le pays croule sous le poids combiné de la corruption, de l’impunité, du chômage, du népotisme, de l’incompétence, de la gangstérisation et autres agents de fragilisation d’une population qui n’a jamais rien demandé qu’un peu de sérénité pour s’occuper de ses affaires.

Les personnes non hétérosexuelles, pas plus que les personnes hétérosexuelles, ne le sont pas que dans leur chambre toutefois et il me semble important de le rappeler. Cela peut partir d’un bon sentiment mais sert trop souvent de justificatif pour les traiter en citoyen.ne.s de seconde zone. Tant qu’ils.elles gardent leurs déviances dans leur intimité, on ne s’en formalisera pas autrement. Ailleurs, le carcan hétéronormatif les attend sinon, gare !

De tels raisonnements participent de l’invisibilisation de la communauté et ajoute de l’eau au moulin des homophobes. Après tout, si ces gens se cachent, n’est-ce pas la preuve qu’eux-mêmes savent que leurs pratiques sont contre Dieu et contre la nature ? Le tout premier cardinal haïtien y a vu une justification de sa haine contre le vodou ; un homophobe n’en demande pas tant.

Nous avons de la chance. Chez nous, l’homosexualité n’est pas un crime. Il y a bien eu ce vote homophobe au Sénat de la République mais cela n’a pas été plus loin. Aujourd’hui, nous avons un décret sur l’identification nationale autorisant le changement de morphologie et un (nouveau) code pénal condamnant les discriminations en fonction du genre et de l’orientation sexuelle. Ce n’est pas encore la grande égalité mais nous sommes loin de l’homophobie institutionnalisée des 72 pays où l’homosexualité est encore un crime.

Carte des lois sur l’orientation sexuelle dans le monde. Source : ILGA- https://ilga.org/fr/carte-lois-orientation-sexuelle-decembre-2019

Nous nous contentons de la neutralité la plus neutre. Pas de criminalisation. Pas de protection – décrets récents de Jovenel Moïse exceptés. En clair, ce que font les personnes non hétérosexuelles dans leurs chambres ne nous concerne en rien. Ce qu’on leur fait en dehors de leurs chambres, non plus.

Hormis quelques rares poussées ochlocratiques, il n’existe pas de campagnes de répression contre les personnes LGBTQIA+. Les violences à leur égard sont toutefois courantes, physiques souvent, morales certainement. Cela ne dérange pas particulièrement. Ils.elles n’avaient qu’à être différent.e.s dans leurs chambres. Les actes homophobes finissent, eux aussi, par être invisibilisés. Pas de chiffres, pas de statistiques. Le déni le dispute à la négation.

Pour combattre l’homophobie, il faut briser le silence. Il faut en parler et, surtout, il faut voir. Voir la non-hétérosexualité en public et participer à sa normalisation. L’égalité de tou.te.s et pour tou.te.s est à ce prix.

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