Quand le hougan te donne un point pour dormir au carrefour, ce n’est pas pour t’encourager à descendre la tête en bas du cocotier. À deux reprises, le Dr Garry Conille a négligé la sagesse des proverbes des gens du peuple, peut-être par manque d’un Derilus pour le lui rappeler, mais certainement pas parce qu’il ne lit pas ce blog, où nous avons expliqué, maintes fois, comment le caractère spontané du Léviathan qu’est le Blan le rend prompt à se retourner, sans hésitation, contre ceux qu’il protégeait la veille. Comme d’autres avant lui, confiant dans le soutien de son maître, Conille aura multiplié les actions d’éclat, participant à l’humiliation en règle de la nation via le Conseil présidentiel de Transition (CPT), jusqu’à ce que, inévitablement, son tour arrive.
Alix Didier Fils-Aimé devient donc le troisième Premier ministre de l’an de grâce 2024. Il succède à deux médecins, Ariel Henry et Garry Conille, tous deux arrivés triomphants via un tweet de l’Ambassade américaine et tous deux repartis, la queue entre les jambes, dans l’indifférence américaine. Malinchistes primaires, les politiciens haïtiens cherchent avidement une légitimité auprès des instances internationales, bien plus qu’auprès des Haïtiens eux-mêmes… jusqu’au jour où ce soutien se volatilise, toujours à la suprenante surprise du concerné.
Le Département d’État vient de publier un communiqué reconnaissant la décision du CPT de remplacer Conille, remerciant ce dernier pour son « service distingué » et saluant l’arrivée de Fils-Aimé. Pour les États-Unis, un Premier ministre sous-traitant en vaut un autre : il n’est qu’un pion de plus, aisément jetable dès qu’il ne remplit plus son rôle selon les attentes de Washington. Le CPT, existant et se maintenant sous la bénédiction des États-Unis relayée par la CARICOM, et sans aucun ancrage populaire, ferait bien de s’en souvenir.
Dans son communiqué, le Département d’État qui parle d’échanges préalables à ce changement de chef de gouvernement, invite le CPT à « clarifier les rôles et responsabilités » pour « préserver la crédibilité auprès de la population haïtienne ». Il est vrai que ces nominations et révocations se faisant en marge de tout cadre légal – et même de l’accord du 4 avril ayant donné naissance au CPT – ne peuvent que convaincre un peuple livré à lui-même alors que des personnes qu’il ne connait ni en peintre ni en peinture décident de sa destinée.
Conille, imposé en dehors des règles et révoqué sans cérémonie, n’aura été qu’un outil temporaire au service d’intérêts nébuleux, ne nous laissant que la promesse non tenue de reprendre le pays maison par maison, quartier par quartier, ville par ville, et quelques t-shirts et banderoles promotionnels saluant l’action de son gouvrnement qui aura, pendant quelques semaines, balayé que quelques coins de Pétion-Ville, rue par rue.
Cette succession de Premiers ministres, appuyés puis lâchés par les États-Unis, ne fait que renforcer la perception que la transition actuelle n’a pas pour objectif de stabiliser Haïti, mais de servir des intérêts étrangers au peuple haïtien. Et maintenant que Conille est relégué au passé, nous restons avec un Conseil présidentiel qui, à force d’initiatives fluctuantes, perd un peu plus à chaque étape la légitimité qu’il n’a jamais eue.
Les États-Unis rappellent qu’ils sont « fermement engagés à soutenir le peuple haïtien, » mais il vaut mieux pour l’administration haïtienne de se rappeler cette autre sagesse populaire : le bout de fer à l’arrière de la mairie se vantait de sa position mais a fini rouillé par la pisse des vagabonds.





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