Dans la nuit du 19 au 20 juin 1988, un président élu dans des conditions controversées est renversé par le général qui l’avait précédé à son poste et qu’il venait de mettre aux arrêts. C’est ainsi que le professeur Leslie Manigat qui succédait au général Henri Namphy se verra succédé par le même général Namphy selon un mécanisme coutumier de nos contrées: le coup d’État. Trois mois plus tard , le général Namphy sera à son tour renversé par le général Prosper Avril.
Dans notre histoire riche et mouvementée, il n’est qu’un seul président à avoir complété son mandat constitutionnel pour transmettre le pouvoir à un autre président élu. Un seul. Et il a réussi l’exploit deux fois. C’est l’énigme Préval. Les autres n’ont pas eu cette chance. À commencer par notre père fondateur, l’empereur Jean-Jacques Dessalines assassiné par ses compagnons d’armes lors du premier coup d’État de notre histoire.
Après Dessalines, quatre autres chefs d’État – Sylvain Salnave, Cincinnatus Leconte, Vilbrun Guillaume Sam et plus récemment Jovenel Moïse – ont été assassinés. La moitié des dirigeants haïtiens ont été renversés puis exilés, tandis que les autres ont dû composer avec l’instabilité, une constante dans la politique haïtienne où les appels à la tabula rasa sont aussi fréquents que stériles. Aussi peiné-je à comprendre comment nous en sommes arrivés à nous embarasser de constitutionnalité pour parler du départ d’Ariel Henry alors que lui préside à nos destinées dans l’a-constitutionnalité la plus totale.
Ariel Henry n’étant pas arrivé par la Constitution, il ne saurait partir par la Constitution. Du reste, même s’il l’avait été, depuis quand de telles considérations ont-elles été un frein dans le contexte haïtien ? Certes, depuis quelque temps, les juristes de la République, adeptes du per fas et nefas, ont disparu de l’espace public. Il est toutefois difficile de concevoir que celleux qui vendaient le große Lüge de la fin du mandat de Jovenel Moïse puissent se sentir le moindrement lié par la recherche d’un mécanisme constitutionnel pour démettre de ses fonctions l’actuel président provisoire à vie.
Ariel Henry a toutefois accédé au pouvoir par un tweet du Blan. L’autorité de nomination étant généralement l’autorité de révocation, l’on attend donc du Blan qu’il veuille bien déposer Henry. Sauf que, pour l’instant, le Blan n’en a pas envie.





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