Nos « terrorists » désignés continuent de jouer la carte du spectacle pour bien asseoir leur présence dans l’espace public. Cette fois, c’est la maison d’un ancien député fraîchement écroué qu’ils livrent aux flammes. Dans une vidéo circulant dans l’infosphère haïtienne, une voix s’adresse à Alfredo Antoine, arrêté le 4 avril pour financement présumé de gangs. Elle l’accuse d’avoir bâti une belle maison pour sa famille pendant que le peuple crève. Pa gen alèz, bò falèz, dit la voix, manifestement ravie de sa formule, qu’elle répète comme un slogan.
La « revanche du peuple » serait donc arrivée via quatre foyers de feu bien placés sur des chaises en cuir, dont quelques flammes timides qui épargnent les rideaux pourtant tout proches. Un peu de fumée, une valise fleurie au sol, et la scène est complète.
Certes, les histoires de monstres qui se tournent contre leurs créateurs sont légion. Et même si, depuis quelque temps, nous discutons de ces violons sans maîtres, il faut sans doute nous faire à l’idée qu’il est tout à fait possible que ce soient les créateurs eux-mêmes qui allument l’allumette.
Tel avocat du peuple dont la voiture de dixième main — et rien d’autre — flambe dans la cour de sa maison, sous la rage maîtrisée d’une foule déchaînée. Tel homme de théâtre de gauche devenu premier de droite, qui participait aux simulacres d’actions violentes contre un prêtre devenu président. Telle radio, enfin, qui invite régulièrement les chefs de gang à se raconter sur ses ondes.
L’incendie est bien réel. Sa mise en scène l’est tout autant. Trop bien filmée, trop peu farouche, trop utile. Presque un acte notarié. Le chaos en Haïti a ses pyromanes professionnels. Et, peut-être que, parfois, il faut savoir perdre une maison pour tenter de regagner un peu d’innocence.
Dix ans plus tôt, Alfredo Antoine était arrêté pour faux et usage de faux alors qu’il briguait un siège à Kenscoff sous la bannière de KID. Interpellé après une émission de radio par des agents du BRI, il avait été libéré quelques heures plus tard. Cette année, la farine n’est pas venue dans le même sac. Un mois après, il est encore sous les verrous.
Mais, dans un pays où le feu purifie autant qu’il efface, un incendie suffira peut-être à lui rouvrir la porte.
PS: La maison incendiée n’est même pas celle du député. Les vrais propriétaires ne sont pas en Haïti et préfèrent garder l’anonymat.





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