Feu le pape François pensait l’enfer vide — quand il ne le déclarait pas tout simplement inexistant. Ou, à tout le moins, il l’espérait. Le pape le plus libéral de notre vie. Le premier pape américain — lire : du continent — était un homme qui espérait que tous les enfants de Dieu le retrouvent à la fin de leur vie. Tous·tes, tant qu’iels sont.
C’est ce qui faisait que, malgré moi, j’écoutais le pape François. Que je lisais ses déclarations. Que je me surprenais à le croire sincère. Et c’est surtout ce qui parlait à la petite fille de huit ans que je fus, celle qui trouvait le petit Jésus adorable, même si elle avait déjà cessé de croire.
Car, enfin, s’il nous faut absolument un Dieu, ce doit être celui du pape François. Un Dieu qui ne peut se résoudre à torturer indéfiniment un être humain. Qu’il soit LGBTQ+, qu’il soit Palestinien. Qu’il soit immigré, qu’il soit réfugié. Qu’il soit pécheur ou qu’il soit juste fatigué.
Jorge Mario Bergoglio n’a pas révolutionné la foi. Il n’abolissait pas les dogmes, il en déplaçait les centres de gravité. Il déplaçait Dieu. Il le sortait du trône de jugement éternel pour l’installer dans une tente de campagne au chevet de ceux qu’on abandonne. Pas un Dieu qui compte les péchés, mais un Dieu qui panse les plaies.
L’enfer est un pilier de nombreuses traditions religieuses. Et pas que chrétiennes. D’après certaines interprétations juives, même Jésus,le Christ, n’y échappe pas. Depuis sa crucifixion, il se retrouverait dans un enfer réservé aux hérétiques, où il serait condamné à être éternellement bouilli dans de l’excrément. Pour avoir dévié. Osé parler. Été aimé.
L’idée d’un enfer éternel, d’un tourment infini, est non seulement insoutenable, elle est inhumaine. Elle est fasciste. Une punition perpétuelle, un mécanisme de domination. C’est Kafka, sans échappatoire. C’est, d’un point de vue moral, un naufrage. Quelle faute humaine justifie un châtiment sans fin ? Comment croire à une justice divine qui penche vers la cruauté ?
Je ne sais où va un pape quand il meurt. J’espère juste que le pape François s’est endormi en paix. Depuis ce matin, je repense à cette réponse qu’il fit, le 1er novembre 2017, jour de la Toussaint, dans une émission télévisée catholique où on l’interrogeait sur la prière.
Comme on lui demandait s’il lui arrivait vraiment de s’endormir en priant, il avait souri et répondu :
« Quand je prie, il m’arrive de m’endormir… Sainte Thérèse le faisait aussi. Et cela plaît à Dieu. Nous devons nous sentir comme des enfants dans les bras de leur père. »
Il est mort un lundi de Pâques. Le jour où l’on célèbre le retour à la vie, la résurrection, la fin du tombeau. Je ne peux m’empêcher d’y voir un symbole. Que, peut-être, au fond, il n’y a plus rien à craindre. Que, peut-être, oui, l’enfer est vide.





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