J’ai une question existentielle. Qui contrôle actuellement l’espace aérien haïtien ? Les États évacuent un à un leurs ressortissants. Les nantis s’échappent via la République dominicaine. Un nouveau service de transport reliant Pétion-Ville et les villes de province vient de voir le jour. Soit. La situation est grave. On s’adapte. Mais qui surveille ces déplacements tous azimuts ? Ces vols qui se multiplient quand ports et aéroports sont fermés et que le ciel devient progressivement le nouveau territoire perdu d’Haïti. Ces bruits d’hélices qui désormais rivalisent avec les tirs dans le concerto baroque qu’est devenue la vie dans la capitale haïtienne. Cet hélicoptère qui arrive la nuit chez un voisin et repart sans le voisin en ayant livré Dieu seul sait quoi pour Dieu seul sait qui.
Réfléchissons un instant. Les gangs doivent bien se ravitailler. Avec la terre et la mer hors jeu, l’air devient logiquement le moyen le plus probable pour que des munitions leur parviennent. Et comme ils ne semblent guère s’inquiéter d’une pénurie, se livrant à des salves pour ainsi dire ludiques, il semble évident qu’ils ne craignent pas de manquer de provisions. Cette certitude doit bien leur venir de quelque part. Étant donné que personne ne sait ce qui se trafique dans ces hélicoptères, la possibilité ne peut être écartée.
Mais il n’y a pas que les armes. Le narco-trafic et toutes autres formes de trafics, notamment humains, qui prospèrent en l’absence de l’État pourraient donner naissance, à une heure de Miami, à un nouveau narco-État éliminant toutes les chances de développement du pays, compromettant sa gouvernance, et sacrifiant sa population sur l’autel du dieu-argent. Ces hélicoptères dont l’usage à profusion et délibéré devrait inquiéter sont possiblement porteurs d’une instabilité encore plus grave où la dégradation sociale, l’affaiblissement des institutions et la corruption généralisée, ne faisant plus face à aucun obstacle, risquent d’installer Haïti durablement dans la faillite qui est la sienne.
Les Haïtiens, n’ayant plus aucun lien les retenant chez eux, vont alors fuir par millions vers la CARICOM d’abord, en raison de sa proximité géographique, puis vers les autres États du continent, avec les États-Unis d’Amérique comme destination ultime. Peut-être même est-ce là notre destin ultime tel qu’envisagé par Dessalines : apporter la liberté aux peuples américains, quoi qu’il en coûte.





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