Washington – 12 septembre 2025
Le président américain Donald Trump a reçu vendredi à la Maison-Blanche le nouveau dirigeant haïtien Jimmy “Barbecue” Chérizier, à l’occasion de sa première visite officielle aux États-Unis. Ancien policier devenu chef d’une coalition armée, Chérizier a pris le pouvoir à Port-au-Prince en mai dernier. Trump l’a exhorté à “nettoyer les rues” et “reprendre le contrôle total du territoire”, après des mois d’anarchie.
Les inquiétudes liées aux exécutions sommaires, aux déplacements forcés de population et aux règlements de comptes violents n’ont pas été abordées publiquement. Les premiers mois du nouveau régime, né de l’effondrement du Conseil présidentiel de transition (CPT), ont été marquées par une réorganisation brutale des rapports de force dans la capitale.
Critiqué pour avoir accueilli dans le bureau ovale un homme sous sanctions américaines depuis 2022 et désigné par plusieurs ONG comme responsable de massacres de civils, Trump a balayé les objections : “Je préfère un chef qui rétablit l’ordre à un président qui pleurniche pendant que les gens crèvent comme des chiens dans la rue.” Une sortie d’autant plus remarquable que, lors de son premier mandat, le président avait qualifié Haïti de “shithole country”, et qu’il avait, durant sa plus récente campagne, accusé les Haïtiens de “manger les animaux de compagnie” des Américains.
Le président américain a affirmé avoir dit à Chérizier que “ce qui compte, c’est les résultats”, avant d’ajouter : “Haïti était un champ de ruines. Aujourd’hui, c’est un homme fort qui tient le volant. C’est exactement ce dont ils avaient besoin.”
Il a salué une “victoire sur le chaos” et estimé que Chérizier “montre la voie à d’autres pays de la région”. À propos des accusations visant Viv Ansanm, il a déclaré : “Les ONG aiment parler. Nous, on regarde ce qui fonctionne.”
Vers une levée progressive des sanctions
L’administration Trump a confirmé qu’un processus de réexamen des sanctions contre Chérizier était en cours. Plusieurs hauts responsables de Viv Ansanm font encore l’objet de mesures restrictives, mais Washington a décidé d’une exemption diplomatique pour permettre la tenue de cette visite.
“Il faut savoir tourner la page. Ce gars a pris un pays en ruine et il l’a remis sur pied. On a besoin de partenaires comme ça dans l’hémisphère,” a affirmé un conseiller à la sécurité nationale.
De son côté, Chérizier a affirmé que son gouvernement était prêt à “travailler avec les Américains” pour la stabilité de la région. Des discussions ont été évoquées avec des pays voisins pour “endiguer les flux migratoires incontrôlés” et “sécuriser les investissements”.
Un climat favorable au business
Les discussions ont officiellement porté sur la “coopération sécuritaire, la lutte contre les trafics et les investissements stratégiques”. Officieusement, plusieurs conglomérats américains – énergie, ports, infrastructures – ont exprimé leur intérêt pour des concessions à long terme dans les zones contrôlées par Viv Ansanm.
Chérizier aurait rencontré à Washington les représentants de G4S, Halliburton et Vulcan Materials Company. Des accords de principe seraient en cours pour la sécurisation du port de Lafiteau et la gestion privée de plusieurs routes nationales.
Trump a insisté : “Les ONG ont eu 20 ans pour faire semblant de reconstruire ce pays. Maintenant, c’est aux entrepreneurs de jouer. Et à ceux qui savent faire régner l’ordre.”
Un retour aux affaires
Les États-Unis, ancienne puissance occupante d’Haïti, voient dans ce nouveau contexte une opportunité de renforcer leur influence dans le pays après des années de désengagement diplomatique, alors que plusieurs entreprises américaines cherchent également à obtenir des contrats.
La semaine dernière, American Gateways a signé un contrat de 30 ans pour la gestion du port de Miragoâne.
Trump a clairement indiqué que les États-Unis “suivront de près” les actions du nouveau pouvoir. “Jimmy sait ce qu’il a à faire. Et il le fait bien. Je lui ai dit : on compte sur toi pour nettoyer la baraque.”
Une visite qui divise Washington
L’invitation de Chérizier à la Maison-Blanche a provoqué une vive polémique aux États-Unis. Côté républicain, certains saluent “une diplomatie réaliste et assumée”. D’autres, côté démocrate, dénoncent une “légitimation honteuse de la violence politique”.
“On ne peut pas dire qu’on combat le crime organisé et dérouler le tapis rouge à un homme accusé de crimes de guerre”, a déclaré la représentante Alexandria Ocasio-Cortez.
Mais Trump, fidèle à son style, a répondu : “On ne gagne pas avec des bonnes intentions. On gagne avec des gars solides. Barbecue, c’est un gars solide. America First, Haiti Strong.”
P.S. Ce texte reprend la structure d’un article publié par France 24 le 7 mai 2025, décrivant la visite officielle du chef syrien Ahmed al-Sharaa à Emmanuel Macron. En transposant cette scène à Haïti, le billet anticipe un scénario désormais crédible : la normalisation diplomatique de Jimmy Chérizier. La désignation récente de Viv Ansanm comme organisation terroriste par les États-Unis d’Amérique, en reconnaissant ipso facto une entité politique là où il y avait une coalition mafieuse, ouvre la voie à ce type d’issue : un futur où la force armée devient une forme acceptable de gouvernance… tant qu’elle passe des contrats.





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