Du viol à l’X

En 2001, une jeune femme de 17 ans a dû assister impuissante à la mise en place par les garçons de son école d’ingénieurs d’un compte à rebours jusqu’au jour où elle serait enfin « majeure et vaccinée ». C’était au cours de sa semaine d’intégration. Sa toute première semaine à sa nouvelle école. Ses nouveaux camarades ont trouvé la blague drôle. Comme une faveur qu’on lui faisait.

Elle, trouvait la blague douteuse, mais c’était une classe où les hommes étaient une écrasante majorité et au début des années 2000, il y avait des comptes à rebours pour tout le monde. Britney Spears, Laurie et donc pourquoi pas elle. La blague s’étendit aux cadeaux, chants et autres démonstrations qui suivirent pour la Saint-Valentin, où tout le monde semblait s’être donné le mot pour lui faire livrer des présents en classe … en attendant qu’elle soit légale. 

La blague cessera d’être drôle lorsque le professeur de mécanique – qu’elle avait dû menacer de signaler à l’ombudsman parce qu’il lui demandait régulièrement de rester après le cours – lui  demandera, excédé, de faire cesser ces livraisons par ses admirateurs pour qu’il puisse faire son cours. L’année d’après, majeure et vaccinée, elle n’est pas revenue et a changé de filière. Elle ne pouvait se résoudre à devoir appeler confrères des gens qui l’ont réduit à un objet sexuel dont ils discutaient ouvertement les formes, la tenue et la légalité d’y accéder sans se soucier de son avis.

Pourtant, cette jeune femme a eu de la chance. En France, pour l’académique 2023-2024 à Polytechnique, ce sont 23 cas de viols et 118 agressions sexuelles qui ont été signalés. Ces chiffres sont d’autant plus révoltants que sur les 2192 étudiants du cycle ingénieur, 388 sont des femmes. Une situation « intolérable » d’après, Laura Chaubard, la directrice générale de l’institution qui, culture polytechnique oblige, a elle-même dû connaître bien des situations intolérables lorsqu’elle est entrée à l’école à l’âge de 19 ans.

Certains métiers « masculins » le demeurent parce que ces messieurs rendent le milieu hostile aux femmes. À l’école de la jeune femme du début, une douzaine d’années auparavant, un aspirant ingénieur avait déclenché une fusillade tuant 14 étudiantes, prétextant que les « féministes » lui auraient volé sa place.

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