Le diplômé en relations internationales moyen est une femme

La nouvelle Ministre des Affaires Étrangères vient d’annoncer un changement important dans la diplomatie haïtienne, basé sur une évaluation des profils et des performances des diplomates. Madame Dupuy, qui avait été l’objet d’une lettre de blâme de la part de l’ancien Chancelier lors de sa candidature avortée au Conseil Présidentiel de Transition, se voit aujourd’hui en position de faire le ménage dans le ministère. À l’époque, la rumeur voulait que cette lettre ait été motivée par certains collègues qui n’appréciaient guère celle qui était alors la représentante d’Haïti à l’UNESCO. Aujourd’hui en position de pouvoir, elle en profite pour faire le ménage, ce qui n’est pas plus mal, d’autant que notre personnel diplomatique, abonné aux scandales, en a terriblement besoin.

Air du temps oblige, un cabinet ministériel composé à plus de deux tiers d’hommes doit se faire pardonner auprès d’une population majoritairement féminine. Aussi, Madame Dupuy informe-t-elle qu’en attendant, plus de la moitié des missions diplomatiques seront dirigées par des femmes. Et vous ne devinerez jamais la suite.

Dans les commentaires mais également en tweets séparés, des hommes (et au moins une femme) de bonne volonté se montrent magnanimes, acceptant que des femmes soient provisoirement à la tête de la moitié de nos missions diplomatiques, mais insistent sur le fait qu’il faut surtout s’assurer de leur compétence. Dès qu’il s’agit pour une femme d’atteindre un poste de pouvoir, les exigences d’intégrité et de compétence surgissent immédiatement accompagnées pour accompagner la condescendante bienveillance masculine.

Ces exigences, qui devraient être universelles, sont presque exclusivement brandies dans le cas des femmes. En toute objectivité, bien sûr. De cette objectivité teintée de la perspective d’un libéral voyant ses privilèges menacés mais ne pouvant recourir à l’hostilité grossière d’un conservateur inculte. Oui, pour des femmes aux postes de pouvoir, mais qu’elles soient compétentes, hein ? Comme si le choix des chefs de nos missions diplomatiques était le plus objectif qui soit et que c’est exclusivement en raison de leur compétence que des hommes les dirigent.

Pourtant, dans nos écoles de formation, le diplômé moyen en relations internationales est une jeune femme. Trop souvent, si elle ne se trouve pas un parlementaire ou un haut fonctionnaire (parent, ami ou amant) pour la soutenir, elle finira dans une des nombreuses organisations internationales – gouvernementales ou non – qui servent de pauvres substituts à un État haïtien en déroute.

Il importe de questionner certains réflexes qui nous poussent à exiger compétence et intégrité des minorités (parfois majoritaires comme les femmes), visibles (comme les non-Blancs dans les pays du Nord) ou sexuelles (comme les personnes LGBT), alors que d’autres (généralement mâles et hétérosexuels) sont perçus par défaut comme les visages du pouvoir. Cette remise en question est essentielle pour déconstruire le vieux monde pendant que nous construisons le nouveau.

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