Des élections prytaniennes

Les résultats du très scruté scrutin du 25 octobre 2015 sont connus. Les procès-verbaux circulent. Les chiffres s’accumulent. Les pourcentages fusent. Les gagnants au premier tour sont désormais identifiés. Les mathématiques classiques en prennent un coup mais elles survivront. Elles s’adapteront. Chez nous, les mathématiques sont magiques. Les mal parlants, mathématiciens victimes d’acculturation, parleront d’effondrement de la logique. Egri k ap megri. Nos candidats ne sont pas dupes.

Jovenel Moïse, dauphin de notre président actuel, ouvre la démonstration. Trois  jours avant les élections, il invitait les futurs perdants à respecter les résultats des urnes et accepter sa victoire. Une prédiction validée par les résultats préliminaires du CEP des réseaux sociaux circulant sur Facebook et WhatsApp depuis dimanche soir.

Ne se laissant pas démonter pour si peu, l’autre Moïse (Jean-Charles) de cette longue traversée de la Mer Rouge, promet d’envahir le béton que les résultats publiés soient en sa faveur ou pas, les enfants de Dessalines ayant clairement gagné les élections. Ils ont d’ailleurs pris les rues, en centaines, pour le prouver.

Suit Jude Célestin qui, un jour après les élections, crie au scandale, à la manipulation et prend à témoin la population haïtienne qui est sortie en masse le voter pour lui permettre de gagner au premier tour et rappelle que ce qui s’est passé à la  veillée ne se passera pas à l’enterrement.

Fanmi Lavalas a emboîté le pas hier. Fidèle à elle-même, Maryse Narcisse, laisse son parti parler pour elle. Toutefois, elle aussi a gagné au premier tour. Télé Timoun le rappelle en boucle.

Steven Benoît, démenti par son parti sur la question des mandats, est plus humble. Il ne va pas dire qu’il a gagné mais les fraudes sont évidentes et menacent clairement la démocratie. Jean-Henri (qui est Céant) s’insurge aussi contre les fraudes massives et invite la population à rester mobilisée.

Aucun candidat à la présidence n’a encore reconnu sa défaite. Ils ne se sont pas encore tous prononcés mais il est fort possible qu’ils aient eux, aussi, obtenu le fameux 50% +1 ou soient admis au second tour. Devant l’évidence, il nous faut nous ajuster à la situation. Je propose d’adopter le système de la Prytanie. Une présidence tournante où chaque président exercerait le pouvoir pendant une semaine.

Il y a un surplus de deux candidats mais celui dont l’origine semble l’avoir condamné, ayant rejoint le camp d’un autre candidat, acceptera peut-être de passer son tour. Un autre se sacrifiera pour la Patrie. Sinon, tant pis, mathématique magique oblige, nous établirons une année de 54 semaines.

Impossible n’est pas haïtien. L’improbabilité, oui.

9 commentaires sur “Des élections prytaniennes

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  1. Mme Camilien,

    Vous parliez dans un de vos derniers billets d’Antigone. Par rapport à la proposition de présidence tournante, je voudrais vous rappeler que les fils d’Oedipe et frères d’Antigone, Etéocle et Polynice, ont déclenché une guerre qui a détruit Thèbes et au cours de laquelle ils ont perdu la vie parce qu’une entente similaire à ce que vous prônez. En effet, le « deal » était qu’après l’abdication de leur père, ils occuperaient successivement le pouvoir une année sur deux. Devinez! Etéocle après son année au pouvoir refuse de céder la place à son frère comme convenu. Imaginez
    notre pauvre Haïti gérant 52 (?) guerres l’an!

    Mais avançons dans les propositions, nous pourrions imaginer un second tour avec tous les gagnants auto-proclamés en gladiateur dans une arène qui pourrait être le kiosque Occide Jeanty et le public de Carifesta. Et que le meilleur gagne! sans dommages collatéraux.

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    1. Effectivement. Mais à situation osée, solution osée. Cela a marché pour les bouleutes dont le pouvoir était aussi limité que celui de nos présidents; limitation consacrée par le très restrictif article 150 de la Constitution : Le Président n’a d’autres pouvoirs que ceux que lui attribuent la Constitution. Du reste, une semaine c’est peu pour s’emparer de l’appareil étatique… à moins, naturellement, que l’oncle Créon ne s’en mêle…

      Sinon, l’idée d’un pugilat au second tour pour l’amusement du peuple a un certain intérêt. Gladiateurs, vous dites ? Un combat à mort, donc ?

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  2. Les élections ici c’est déjà des combats à mort. On devrait penser à faire le décompte des morts violentes durant les campagnes électorales, les élections et après les élections.

    Je propose que ne trépassent que ceux qui commanditent et non plus les simples partisans. On créerait un espace d’expression pour tous les « gason kanson », les « fanm pantalèt fè », les « GNB », tous les démiurges qui confondent « vouloir » et « pouvoir », tous ceux qui veulent le pouvoir à tout prix surtout quand le prix c’est Le sang des autres (film à voir)…

    Je parie que le pays se mettrait à en produire beaucoup moins et donc, peut-être, plus de cerveaux et de raison pour faire évoluer les choses.

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